Grâce à cinq build-up, l’ex-Sword France a renforcé sa double expertise d’intégrateur et d’éditeur de logiciels multispécialiste.
Argos Wityu a bouclé sa sortie de Coexya au profit de Talan le 17 décembre. En quatre ans, il a accompagné le quasi-doublement de taille de l’ex-Sword France et éprouvé son modèle d’intégration et de management décentralisé.
Le 17 décembre 2024, Coexya a signé son retour dans le giron d’un grand groupe, en l’occurrence Talan. En effet, ce jour-là a été finalisée la cession de l’ex-Sword France par Argos Wityu, son actionnaire majoritaire depuis 2020, au profit de la participation de TowerBrook Capital Partners. Cette dernière a pris le meilleur sur plusieurs fonds et quelques-uns de ses concurrents, dont Onepoint, pour mettre la main sur cette entité de 112 millions d’euros de chiffre d’affaires dont le métier principal est l’intégration de logiciels spécialisés notamment en gestion électronique des documents et systèmes d’information géographique (SIG). Elle possède également une gamme de programmes propriétaires, édités par ses soins, dans des secteurs comme la santé ou la protection intellectuelle. « Nous travaillons par exemple pour la RATP afin de lui construire un programme de représentation 3D des stations de métro et, dans le registre de l’aide au voyageur, nous sommes à l’origine du projet ViaNavigo en Île-de-France. Nous avons également une gamme historique de logiciels servant à la gestion des offices des brevets et des marques, comme l’INPI en France, qui nous conduit à être présents dans 17 pays auprès de ces structures », illustre Philippe Le Calvé, président de Coexya.
Compléter une organisation éprouvée
Entré dans le groupe Sword dès sa fondation en 2000, il en a progressivement gravi les échelons jusqu’à prendre la direction de sa filiale française. En 2020, il est donc embarqué dans l’aventure du LBO avec Argos Wityu à la suite de la volonté de son précédent patron, Jacques Mottard, de se séparer de sa branche hexagonale. « Nous bénéficiions d’une grande autonomie chez Sword, basée sur une organisation très décentralisée. Cela a facilité les choses au moment du carve-out, car nous avons rapidement été en capacité de vivre de façon autonome. Tout en continuant à développer nos spécialités comme nous le faisions depuis de nombreuses années, nous souhaitions profiter du soutien de notre nouvel actionnaire pour réaliser des opérations de croissance externe et ainsi nous renforcer sur nos marchés de prédilection voire tenter d’en ouvrir d’autres », résume le dirigeant.
Contrairement à de nombreuses autres histoires de LBO sur des entreprises de cette taille – Sword France faisait 60 millions d’euros de chiffre d’affaires à l’époque –, la structuration de l’organigramme ne s’est pas faite à partir d’une feuille totalement blanche. Des ajustements ont certes été apportés, par exemple pour doter la PME d’une direction marketing, de ressources dédiées au M&A ou pour faire évoluer son outil de consolidation financière, mais quelques bases solides ont permis d’avancer rapidement vers le déploiement de la stratégie de croissance externe. Parmi celles-ci figurait le fait que Sword était un groupe coté en Bourse et que sa filiale française était chargée de tous les aspects afférents à cette caractéristique (reporting, compliance…).
VISIONS CROISÉES
Philippe Le Calvé, PDG de Coexya, et Karel Kroupa, managing partner d’Argos Wityu
Private Equity Magazine : Comment vous êtes-vous choisis ?
Karel Kroupa : Nous avons été consultés par Bryan Garnier dans le cadre d’un process déclenché par le fondateur et ancien propriétaire de Coexya. Nous sommes parvenus à trouver un accord, car nous étions convaincus du potentiel de cette filiale : elle était dirigée par une équipe de qualité, avait une place intéressante sur le marché entre spécialiste et généraliste ainsi qu’une réputation de sérieux dans l’exécution des projets, et affichait une répartition de ses revenus prometteuse entre le public et le privé, sans oublier une petite part à l’international.
Philippe Le Calvé : Les discussions finales ont été essentiellement menées par Jacques Mottard, président de Sword. Cela dit, durant le process, j’ai eu l’occasion de rencontrer plusieurs des fonds et des industriels intéressés par nos actifs et j’ai pu apprécier qu’Argos Wityu reste à l’affût en dépit du fait qu’il a été long.
P. E. M. : Quel est votre meilleur souvenir de ces années en commun ?
P. L. C. : J’ai apprécié de pouvoir conserver une grande autonomie dans mes décisions et ma manière de conduire l’entreprise tout en recevant à la fois des conseils et des moyens financiers nouveaux pour en accélérer le développement. Nous avons beaucoup appris aux côtés de l’équipe d’Argos Wityu.
K. K. : Nous avons été marqués par la volonté d’avancer du management emmené par Philippe Le Calvé en conservant toujours le bon dosage de le pragmatisme et d’agilité. Il y a quelque chose du « bon sens paysan » chez Coexya, combiné à une grande confiance dans les équipes, et c’est assez atypique dans des entreprises de cette taille.
P. E. M. : Comment s’est dessinée la sortie ?
K. K. : Au vu des nombreuses marques d’intérêt que nous avons reçues, nous avons décidé d’anticiper le lancement d’un process dont nous avons confié l’animation à Capitalmind afin de trouver un nouvel actionnaire à Coexya. Des fonds et des industriels sont restés en course jusqu’à la fin et c’est Talan qui l’a emporté.
P. L. C. : Cet adossement à Talan va nous aider à atteindre plusieurs de nos objectifs, dont la restructuration et l’accélération de notre développement commercial, la réalisation d’opérations de croissance externe de plus grande ampleur que celles menées à bien jusque-là. Il nous semble que c’est le bon partenaire pour recréer des synergies et de la valeur.
REPÈRES
>>> 2000 : Jacques Mottard reprend des actifs de Decan, qu’il avait fondé quelques années plus tôt, pour créer Sword. Philippe Le Calvé rejoint le groupe comme directeur technique.
>>> 2020 : cession de la filiale française, dirigée par Philippe Le Calvé, dans le cadre d’un LBO avec Argos Wityu. CA : 60 M€.
>>> 2021 : Sword France est renommé Coexya. Premier build-up, sur Geomod.
>>> 2022 : Sword Group sort intégralement du capital de Coexya. Rachats d’Aquila, de Siris et de CloudSpirit.
>>> 2023 : acquisition de PI Services.
>>> 17 décembre 2024 : closing de la vente de Coexya à Talan. CA : 112 M€.