
TSG a réussi sa conquête du marché des nouvelles énergies, où il génère 40 % de ses ventes aujourd’hui.
Sous LBO avec HLD depuis 2020, le spin-off de l’équipementier de stations services Tokheim a doublé de taille en quatre ans grâce à une mutation de son cœur de métier vers la mobilité bas carbone, couplée à une politique d’acquisitions qui a fait carburer sa croissance.
L’été dernier, TSG Group a décroché la médaille Platinium EcoVadis qui le classe parmi les 1 % des meilleures entreprises de son secteur au niveau mondial en termes de durabilité. L’histoire récente de cette ex-division Services de l’inventeur des pompes à essence Tokheim est un cas d’école d’un virage radical vers la transition énergétique impulsé par le volontarisme de ses dirigeants et accéléré par son actionnaire majoritaire HLD depuis son LBO de 2020. Si les voyants sont au vert au niveau RSE avec une bascule de l’activité vers les énergies propres, qui en pèsent 40 % aujourd’hui contre 3 % en 2019, ils le sont également sur le front de la croissance économique et financière : 33 acquisitions dans 16 pays, un chiffre d’affaires doublé à 1,3 milliard d’euros cette année contre 650 millions en 2020 et un Ebitda passé de 50 à 140 millions d’euros.
Un LBO en plein Covid
Pour mesurer le chemin parcouru, il faut remonter à 2016, quand l’entreprise faisait encore office de division Services de Tokheim, ex-participation de Motion Equity Partners. Elle s’en était émancipée lorsque le fabricant de pompes à carburant passait lui-même dans les mains de l’américain Dover Corporation. L’occasion pour le management de cette filiale de prendre les rênes de son destin sous la houlette de Baudouin de la Tour, son CEO de 2016 à 2020. La volonté de faire pivoter le métier de ce spin-off rebaptisé TSG Group vers la mobilité et les énergies renouvelables s’est concrétisée en 2019 avec le recrutement de Jean-Marc Bianchi, ex-CEO du fabricant de ciment alumineux Kerneos. Rôdé aux environnements en forte mutation, le dirigeant avait mené la transformation d’une division de Lafarge, cédée dans le périmètre de Materis lors d’un premier LBO avec Wendel en 2008, puis détourée lors d’un second carve-out couplé à un LBO bis avec Astorg en 2014, jusqu’à sa revente à Imerys en 2016.
Vraisemblablement plus à l’aise avec la gouvernance du private equity, Jean-Marc Bianchi quittera le groupe coté en 2019 pour relever le défi de la transformation de TSG. Ne reste plus qu’à trouver le partenaire financier aux reins solides, aux poches profondes et à la vision industrielle compatible avec ce nouveau cap stratégique. Le process lancé en 2019 connaîtra son dénouement en plein Covid en juin 2020, remporté par HLD, dont le cofondateur Jean-Bernard Lafonta avait déjà côtoyé Jean-Marc Bianchi sous l’ère Wendel. Ce sera le premier deal de Cédric Chateau, qui venait de quitter Advent pour intégrer le partnership d’HLD et prendre la présidence de son comité d’investissement. L’investisseur evergreen prend la majorité du capital, valorisant TSG quelque 500 millions d’euros, soit près de 10 fois son Ebitda. Pour financer l’opération en pleine crise sanitaire, HLD a fait appel à ICG pour une unitranche de 280 millions d’euros, qu’il a refinancée après les 18 mois de non-call par une TLB de 300 millions et une RCF d’un tour de l’Ebitda de l’époque. Le rythme de build-up de TSG a nécessité par la suite deux refinancements, dont le dernier en juillet 2024, qui lui a permis d’obtenir une TLB de plus de 400 millions d’euros et de recharger son RCF pour financer ses acquisitions.
Repères
>>> 2016 : carve-out de Tokheim lors de sa cession par Motion Equity Partners à l’industriel américain Dover Corporation.
>>> 2019 : arrivée de Jean-Marc Bianchi, ex-CEO du fabricant de ciment alumineux Kerneos, pour faire pivoter le métier de TSG Group vers la mobilité et les énergies renouvelables.
>>> 2020 : LBO avec HLD pour une valeur d’entreprise de 500 M€, soit un multiple de 10 fois l’Ebitda. CA : 650 M€.
>>> 2020-2025 : 33 acquisitions dont deux tiers sur les mobilités électriques. Doublement du chiffre d’affaires, à 1,3 Md€ estimé pour l’exercice clos en avril 2025, dont 40 % dans les nouvelles énergies (gaz et électrique) contre 3 % en 2019.
Visions croisées


Jean-Marc Bianchi, président-directeur général de TSG, et Cédric Chateau, associé de HLD, président du comité d’investissement
Private Equity Magazine : Comment vous êtes-vous choisis ?
Cédric Chateau : Nous avons préempté l’opération entre avril et juin 2020, en plein confinement, car nous nous étions forgé la conviction que TSG allait être un des gagnants de la transition énergétique, même si le pari n’était pas évident à l’époque. Le groupe disposait déjà d’une granularité unique en services techniques sur toute l’Europe, ce qui est un atout fondamental dans les business services. La vision du management, qui avait anticipé le virage de la transition énergétique chez ses clients, nous confortait dans l’intuition que TSG allait prendre le lead sur ses concurrents, mais nous n’avions pas de calendrier précis de cette mutation qui s’est finalement concrétisée plus rapidement que prévu.
Jean-Marc Bianchi : L’ADN entrepreneurial et agile d’HLD a été déterminant dans notre choix ainsi que l’horizon de temps non borné par la durée limitée des véhicules d’investissement des acteurs habituels du LBO. En 2020, le poids des énergies traditionnelles était toujours prépondérant et la migration vers l’électrique encore embryonnaire. Nous avions besoin d’un actionnaire rôdé aux LBO transformants.
P. E. M. : Comment avez-vous vécu ce premier cycle ?
C. C. : Le vrai challenge est de réussir à rester performant tout en conduisant une transformation majeure. Le management de TSG nous a impressionné en améliorant sa marge d’Ebitda tout en menant de front des dizaines d’acquisitions. Sur 33 build-up, seuls deux n’ont pas tenu leurs promesses de performance, ce qui est un taux de réussite de greffe exceptionnel.
J.-M. B. : HLD est un actionnaire incarné et accessible qui a soutenu toutes nos décisions d’investissement et a même débridé nos ambitions de M&A en nous encourageant à doubler nos objectifs d’acquisitions. Son expertise et son réseau ont également été précieux dans l’accompagnement de nos recrutements.
P. E. M. : Comment envisagez-vous la suite ?
J.-M. B. : Nous ne sommes encore qu’au début de la transition énergétique : seuls 3 % des véhicules qui roulent aujourd’hui en Europe sont électriques, ce qui ouvre un boulevard de croissance pour nous, aussi bien dans l’équipement en bornes de recharge électriques que dans la maintenance des infrastructures existantes. Nous pouvons donc espérer raisonnablement doubler à nouveau de taille dans les cinq prochaines années.
C. C. : Notre particularité est que nous investissons avec du capital permanent. Nous ne sommes donc pas pressés de sortir tant que nous avons encore une histoire de création de valeur à écrire avec TSG.