Skip to main content

Augmentation du nombre de sociétés de gestion en quête de capitaux, hausse du nombre de souscripteurs en recherche de rendement, progression des montants alloués aux actifs alternatifs, montée en puissance de l’intermédiation… le marché de la levée de fonds et les relations LPs-GPs ont été incontestablement placés sous le signe de la croissance au cours des 20 dernières années, et ce dans toutes leurs dimensions. Certes, l’ambiance n’est pas des plus euphoriques depuis dix-huit à vingt-quatre mois, entre des montants en baisse, des institutionnels qui doivent composer avec un effet dénominateur encore négatif pour leurs allocations en actifs alternatifs et des GPs, y compris des grands noms de l’industrie, qui peinent bien souvent à boucler leurs levées. Néanmoins, sur longue période, le constat d’une expansion significative de l’activité reste assurément valable.

Sa principale caractéristique, de laquelle découlent les autres évolutions, est l’augmentation de l’exposition des investisseurs institutionnels au private equity au sens large. « Aujourd’hui, nous ne nous posons plus la question d’avoir du private equity dans nos allocations ; être présents sur ces marchés est devenu au fil des ans une évidence pour un institutionnel comme nous, témoigne Nicolas Boulet, qui a succédé le 1er janvier à Matthias Seewald au poste de membre du comité exécutif et directeur des investissements d’Allianz France. Nous avons tous progressivement appris ce qu’est cette classe d’actifs, comment fonctionnent les fonds, en quoi consistent les différentes stratégies… Cependant, il y a 20 ans, la situation était très différente et cette activité avait quelque chose de beaucoup plus intimiste. » Si la branche de gestion d’actifs de l’assureur allemand, Allianz IM, a pu bénéficier de la présence dans son giron d’un AGF Private equity pour s’initier aux subtilités de l’investissement au non coté, lui déléguant au départ l’essentiel de ses allocations, ce n’est assurément pas le cas de tous les acteurs.

En outre, dans ces années 2004-2005, beaucoup commençaient à revenir précautionneusement sur le marché, quelque peu échaudés par l’éclatement de la bulle internet. « Lorsque je suis arrivé à la Macif en 2001, ma première mission a été de structurer une allocation en private equity, mais on parlait à l’époque de moins de 1 % des encours, avec une exposition très franco-française et, pour l’international, sous la forme d’investissement dans des fonds de fonds, résume Jean-Philippe Richaud, aujourd’hui directeur général adjoint et directeur des investissements de Swen Capital Partners. Après l’éclatement de la bulle, il a fallu 10 ans pour voir ré-émerger le VC dans les portefeuilles des institutionnels. Dans l’intervalle, ils se sont initiés au buyout, puis progressivement ouverts aux autres stratégies comme l’infrastructure ou la dette privée, inexistantes au début des années 2000. »

Engouement non démenti des institutionnels

Alors que démarrait ce qui s’apparentait déjà à une lune de miel entre GPs et LPs, la grande crise financière a eu pour effet de remettre tous les compteurs à zéro et de stopper net toute activité de levée, tandis que le tarissement des capacités de financement et des liquidités empêchait les fonds de déployer leur poudre sèche. « Après la chute de Lehman Brothers, les institutionnels ont littéralement déserté le marché, se souvient Jean-Philippe Keravec, qui venait tout juste de rejoindre Campbell Lutyens en provenance de chez Calyon. Ils ont dû prendre le temps d’évaluer les risques qui pesaient sur leurs portefeuilles d’actifs, ainsi que les mesures à mettre en œuvre pour y faire face et protéger leur bilan. Dans ces années-là, ils représentaient probablement plus de 90 % du marché des LPs, il y avait très peu de family offices actifs dans ce domaine comme c’est le cas aujourd’hui. »

Une fois passée la sidération de l’automne 2008, et au vu de la réactivité dont ont fait preuve les autorités financières de l’époque, à commencer par les banques centrales de la planète, les choses sont progressivement revenues dans l’ordre. « Le private equity a l’immense avantage de présenter une volatilité des valorisations relativement faible sur longue période. Le choc de la grande crise de 2008 a ainsi été assez vite résorbé. De manière plus générale, la performance nette de notre portefeuille de PE est restée élevée et stable au cours des 15 dernières années en dépit des variations de taux qui ont un impact sur les coûts de financement des LBO, témoigne Martine Legendre, responsable des investissements alternatifs d’Allianz France. Le private equity a prouvé sa capacité à créer de la valeur ; dans l’environnement de taux bas que nous avons connu pendant de longues années, il a apporté un surcroît de rendement. »

Cet appétit grandissant des institutionnels pour la classe d’actifs est dûment documenté par Coller Capital et son « Global private capital barometer », qui a, lui aussi, fêté ses 20 ans l’année dernière. Très régulièrement, l’une des questions posées aux LPs internationaux dans le cadre de ce sondage porte sur leurs perspectives d’allocation aux actifs non cotés à un horizon de plus ou moins long terme. Et, même si les chiffres peuvent différer légèrement d’une édition à l’autre, la tendance reste identique : ils sont plus nombreux à prévoir d’augmenter leur exposition à ces marchés qu’à la réduire. Le dernier baromètre à contenir cette question est celui de l’été 2024 ; à l’époque, ils étaient 31 % à envisager d’accroître leur allocation en private equity au cours des 12 mois suivants. Ce chiffre montait à 33 % pour l’infrastructure et à 48 % pour la dette privée. À la même question posée à la fin de l’année précédente, seuls 25 % des répondants étaient dans ce cas pour le PE, 27 % pour l’infrastructure et 44 % pour le direct lending. « Il se dégage de ce baromètre un sentiment assez positif et rassurant envers la classe d’actifs vers laquelle les LPs sont désireux d’augmenter leur allocation », commentait à l’époque Hani El Khoury, associé chez Coller Capital, dans nos colonnes. Bien entendu, pour que ces bons augures se matérialisent, il reste une condition à remplir : engranger des sorties. Sur ce point, les LPs n’ont pas hésité à mettre la pression sur leurs gérants partenaires à en croire la dernière livraison du baromètre Coller, en date de l’hiver dernier : 88 % des personnes interrogées se disaient alors prêtes à refuser un re-up avec certains ou la plupart de leurs GPs partenaires au cours des 12 mois suivants, 42 % d’entre eux justifiant cette décision par leur performance.

De tels chiffres sont certes le signe d’une certaine impatience des souscripteurs de fonds quant au rythme des distributions ; plus fondamentalement, il en illustre aussi certainement la professionnalisation accrue, assortie d’une forme d’exigence dans le cadre d’un rapport de force dans lequel ils seraient en meilleure position pour défendre leurs intérêts. « Notre métier a incontestablement évolué au fil des années : historiquement, nous sélectionnions des fonds et nous les laissions vivre leur vie naturellement, sous la conduite d’un gérant à qui nous demandions un reporting régulier et du rendement ; aujourd’hui, nous sommes dans une logique de gestion beaucoup plus dynamique et active de notre portefeuille. Cela demande d’internaliser des compétences beaucoup plus proches de l’investissement direct, d’être en capacité de suivre les différentes classes d’actifs qui ont progressivement émergé sur le marché… », témoigne Alexandre Armbruster, responsable des fonds de private equity et d’infrastructures au sein du pôle Fonds de la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

Les caisses de retraite affichent un appétit croissant pour les actifs privés

Les actifs privés ont été placés en haut de la pile des allocations privilégiées par les fonds de pension pour les prochaines années. Dans un sondage réalisé par Create-Research et Amundi*, 86 % d’entre eux prévoient de s’y exposer au cours des trois années à venir. À date, 74 % de ces entités y sont investis au niveau mondial. Leur engouement « s’explique par la recherche accrue de rendements ajustés au risque dans un contexte de faibles rendements réels (72 %), de nouvelles baisses des taux d’intérêt (54 %), d’un plus grand nombre d’entreprises de croissance sur les marchés privés (53 %) et par le fait que les entreprises à croissance rapide restent privées plus longtemps (51 %) », énumère l’étude. Sur cette base, les caisses de retraite n’appréhendent toutefois pas les marchés privés de façon monolithique.

Ainsi, elles affichent une préférence claire pour deux segments : la dette privée à 55 %, avec le direct lending, le financement d’actifs réels et la « distressed debt » comme têtes de pont, et le capital-investissement à 49 %. Viennent ensuite l’infrastructure (40 %), qui a été fortement stimulée par des mesures politiques telles que l’Inflation Reduction Act aux États-Unis et le Green New Deal en Europe, puis l’immobilier (38 %), le capital-risque fermant la marche avec seulement 28 % des structures interrogées prévoyant de s’y exposer. Dans le sondage Create-Research/Amundi, les caisses de retraite font aussi part de leur appétit pour les marchés asiatiques émergents. « Les marchés privés et les marchés émergents asiatiques ont dû s’adapter à une nouvelle ère, avec respectivement des hausses importantes des taux d’intérêt et un nouvel échiquier géopolitique, commente Vincent Mortier, directeur des investissements d’Amundi. Pourtant, ces deux marchés offrent encore de la diversification, des rendements attrayants et sont bien placés pour bénéficier de sources de création de valeur prévisibles liées à des mégatendances séculaires. Il est encourageant de voir de nouvelles allocations sur ces créneaux historiquement sous-investis. »

*Seeking returns in private markets and emerging markets in a disruptive era – Create-Research et Amundi – 2 décembre 2024. Sondage réalisé auprès de 157 fonds de pensions dans le monde, représentant 1 970 milliards d’euros d’actifs.

Seven2, Alter Equity, Axio Capital… encore du mouvement dans les équipes de relations investisseurs

Lucia Casassa (Seven2)
Guillaume Chandy (Axio Capital)

Les équipes de relations investisseurs des sociétés de gestion sont régulièrement l’objet d’annonces de recrutements ou de promotions, signe de l’importance accrue que ces dernières portent à ces fonctions. Les dernières semaines n’ont pas fait exception et, au tournant de l’année 2025, plusieurs GPs ont fait état de mouvements dans ce domaine :

– en même temps que celle de Véronique Goutierre en tant que value creation officer, 21 Invest France a officialisé l’arrivée de Laure Lagarde (Edhec) en tant que chargée des relations investisseurs. Elle était précédemment project manager chez Reach Capital.

– Seven2, de son côté, a intégré une nouvelle responsable des institutions internationales en la personne de Lucia Casassa (SDA Bocconi), ancienne d’Eurazeo et d’Access Capital Partners.

– Axio Capital, Alter Equity ou encore Ouest Croissance Gestion ont également œuvré à la structuration de leurs relations investisseurs. Guillaume Chandy (institut catholique de Lille, université d’Auvergne) occupe désormais le poste de responsable des relations investisseurs du premier après une expérience en banque privée chez Société Générale Private Banking ; Virginia de Guillebon (université Paris Dauphine, Essec) a été recrutée en tant que directrice des relations investisseurs du fonds d’impact ; et Soukanda Bentaleb (HEC Paris, univ. d’Orléans) a été promue secrétaire générale relations investisseurs de la filiale des caisses régionales de Banque populaire de l’ouest, dont elle était directrice d’investissement depuis 2023.

– Elaia a accueilli Pierre Corre (ISC Paris), qui sortait de deux ans chez Jasmin Capital, au sein de son équipe de relations investisseurs.

Pour accéder à l'intégralité des contenus premium, connectez-vous ci-dessous

Abonnez-vous à PEMAG et profitez de tous nos contenus premium

Vous êtes abonné ?